Les mini-maisons: une offre de logement accessible?

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La crise du logement en Ontario oblige certains Ontariens à explorer des moyens alternatifs et économiques pour se loger. Dans le Canton de Tiny, l’option d’habiter dans une mini-maison est possible, mais très encadrée. Le Canton et la Province sont-ils en position d’appuyer davantage ce modèle pour créér une offre de logement accessible?     

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Annique Maheu

IJL – Réseau.Presse 

– Le Goût de vivre

La mini-maison selon le mouvement populaire

            Les restrictions de voyage liées à la COVID-19 ont encouragé plusieurs Nord Américains à vivre de façon alternative, d’adopter un mode de vie nomade et de partager leurs expériences sur les chaînes YouTube et Instagram. Au-delà de l’option du VR et de la vanlife, plusieurs ont choisi de faire construire des mini-maisons sur de grandes remorques qui pouvaient par la suite s’installer sur un terrain vacant ou accomodant déjà un logement. 

            Plusieurs mini-maisons sont maintenant munies de systèmes indépendants pour l’alimentation d’énergie grâce à des panneaux solaires. Quant au traitement d’eaux usées, ce sont des drains français qui sont utilisés pour les eaux grises et les toilettes à compostage ou d’incinération pour les eaux noires. À court terme, ces systèmes ont d’importants impacts positifs sur l’écologie et à long terme ces installations sont souvent plus économiques. 

            La crise du logement et la hausse fulgurante du coût de la vie encouragent les gens à considérer ces mini-maisons en tant que logements économiques, permettant la possession d’une demeure. Par le fait même les gens se permettront une vie simple et économique en communauté ou de manière intergénérationnelle grâce au partage d’une propriété.

La mini-maison selon la Province et le Canton de Tiny

            Selon le Ministère des affaires municipales et de l’habitation de la province de l’Ontario, une mini-maison est un petit logement privé et indépendant. Ce type de logement comprend des espaces pour un salon, une salle à manger, une cuisine, une salle de bain, un espace pour dormir, pouvant être utilisés à longueur d’année.

            La mini-maison peut être la maison principale ou une structure additionnelle et séparée sur une propriété où il y a déjà un logis. La province indique clairement que les caravanes, les véhicules de loisirs et autres structures saisonnières ne sont pas considérés comme des mini-maisons.

            Maryann Hunt, Directrice de la planification et du développement du Canton de Tiny confirme que le Canton encourage et appuie l’installation de mini-maisons sur son territoire. 

            « Le Canton de Tiny a des politiques dans le Plan Officiel du Canton et dans les règlements municipaux sur le zonage qui permettent une unité de logement additionnelle sur des terrains conformes pour cet usage » exprime Mme Hunt. 

            Mme Hunt précise qu’en l’absence d’une définition claire du Canton de Tiny de ce qu’est une mini-maison, les résidents désirant construire ou acheter une mini-maison doivent s’assurer que l’unité soit construite et installée selon le Code du bâtiment de l’Ontario.

« Le Code du bâtiment précise que la grandeur minimale d’une habitation est de 17,5 mètres carrés (environ 188 pieds carrés). Depuis 2022, le Plan officiel du Canton de Tiny permet et définit ce qu’est une unité de logement additionnelle dans le Canton. Dans cette définition on retrouve des précisions sur les suites de jardins » explique Mme Hunt. 

            La Loi sur l’aménagement du territoire de l’Ontario indique qu’une suite de jardin est une structure résidentielle isolée d’une structure existante et qui est conçue pour être portative. En outre, le règlement municipal 22-075 du Canton de Tiny indique que l’usage d’un tel logement doit être temporaire pour une durée maximale de 20 ans. Les suites de jardins sont généralement des maisons modulaires ou maisons mobiles. Ces installations doivent également être conformes aux règlements du Canton quant au traitement des eaux usées ce qui veut dire l’installation de fosses septiques. 

            L’encadrement provincial et municipal indique donc qu’il est impossible d’avoir une mini-maison portative, indépendante en matière de traitement d’eaux sur un terrain sans logement principal. 

            En sus de la règlementation existante du Canton, celui-ci ne permet pas la création de communautés permanentes avec habitations non-saisonnières de mini-maisons telle qu’elles existent dans d’autres provinces du Canada et aux États-Unis. 

Le potentiel des mini-maisons dans un contexte de crise

            Selon une étude menée en 2023 sur le logement accessible par le Comté de Simcoe, les coûts du logement augmentent à un taux plus rapide que les revenus des ménages (107% vs 37%). L’étude révèle également qu’il existe très peu de logements disponibles dans le Comté de Simcoe. 

            Dans le Comté de Simcoe, un logement accessible est un logement locatif ou en propriété dans un état adéquat, approprié en taille, disponible et abordable pour les ménages dont les revenus se situent entre 80% et 120% du revenu médian de cette zone. En général, ceci représente un revenu pour un ménage entre 82 000$ et 123 000$ pour une propriété ou entre 52 000$ et 79 000$ pour un logement locatif. En 2020, le revenu moyen pour les résidents de Tiny était de 77 000$.

            Le rapport du Comté de Simcoe précise que cette demande de logement va au-delà des besoins en logement pour les gens sans domicile fixe. La demande pour le logement accessible comprend aussi des familles dont les parents ont des emplois, par exemple dans le domaine de l’éducation, de la petite enfance, dans le domaine de la restauration. Bref des gens qui ont des revenus raisonnables, qui participent à la société et à l’économie, mais pour qui il existe peu d’options d’hébergement accessible en raison du prix exorbitant des logements.

            Dans la communauté francophone, la rétention de ses membres et l’attrait de nouvelles familles sont freinés par le fait que l’offre d’hébergement est extrêmement limitée et dispendieuse, en comparaison aux salaires offerts par les organismes francophones et des autres secteurs. 

            « Pour nous, c’est une véritable crise, surtout dans les milieux ruraux où c’est déjà un défi de trouver du personnel francophone qualifié ou non, mais quand on en trouve, il n’y a nulle part pour les héberger » exprime Annick Brown, Directrice des services à la famille à La Clé.

            Mme Brown partage que tout récemment, une éducatrice qui était employée à la garderie de La Clé à l’École Sainte-Croix de Lafontaine a dû quitter son emploi puisqu’il n’y avait pas de logement disponible près du village, ni de moyen de transport public entre Penetanguishene et Lafontaine, là où elle avait trouvé un logement. 

            « Pour être en mesure de continuer à offrir des services en français à nos familles francophones, le comté a la responsabilité de trouver des solutions à la crise du logement, non seulement pour les sans-abris avec ou sans emploi, mais pour les professionnels qui veulent travailler dans les milieux ruraux et qui ne peuvent pas à cause du manque de logement et de moyen de transport » affirme Mme Brown.

            Selon David Brunelle, Conseiller municipal du Canton de Tiny, les mini-maisons offrent plusieurs avantages et pourraient répondre aux besoins urgents de logement accessible.

            « Les mini-maisons pourraient offrir une solution gagnante-gagnante-gagnante dans le Canton de Tiny. Le résident en besoin de logement est gagnant en ayant un logement accessible; la communauté est gagnante en ayant des résidents qui travaillent et participent activement au sein de la communauté; et le Canton est gagnant en raison de l’augmentation de la valeur immobilière qui génère plus de revenus en  impôts fonciers » affirme M. Brunelle.

            L’an dernier, M. Brunelle a participé au salon du consommateur « Tiny Home Show » à Ancaster ainsi qu’à la rencontre des leaders municipaux de l’événement. Il témoigne de l’innovation et l’attrait de ces mini-maisons. 

            « En plus de pouvoir répondre à des besoins urgents dans les grands centres urbains, ces mini-maisons offrent des possibilités de logement pour plusieurs tranches socio-démographiques. Que ce soit les aînés qui veulent réduire leurs biens et la charge de l’entretien d’une maison, des jeunes adultes qui quittent le nid familial, ou des gens qui choisissent un mode de vie plus simple et flexible; ces mini-maisons peuvent offrir tout ce dont on a besoin d’une maison conventionnelle mais à plus petite échelle » affirme M. Brunelle.

Des communautés de mini-maisons remarquables

            Au Canada, le leadership d’organismes sans but lucratif et des municipalités avant-gardistes de Frédericton au Nouveau-Brunswick et de St. Thomas en Ontario font en sorte que ces villes offrent maintenant des solutions permanentes à la crise du logement au moyen des mini-maisons. 

            À Frédericton, la communauté et entreprise sociale « 12 Neighbours » est un exemple à succès au Canada. La communauté de logements subventionnés offre des mini-maisons à louer ainsi que des services d’appui au développement personnel pour les résidents ainsi que des opportunités d’emploi progressif. 

            Au centre-ville de St. Thomas au sud de l’Ontario, le projet « Tiny Hope » vise à offrir 40 mini-maisons pour répondre aux besoins d’un grand éventail de citoyens à la recherche de logement. Le projet est le résultat d’une collaboration entre le «YWCA St. Thomas-Elgin », le constructeur « Doug Tarry Homes », l’organisme à but non lucratif « Sanctuary Homes », ainsi que la municipalité de St. Thomas. Le début de la construction des mini-maisons est prévu pour 2024. Les résidents figurant déjà sur la liste d’attente pour un logement abordable auront la priorité.

            Dans le Canton de Tiny, le Conseiller Brunelle conclut qu’il a de l’espoir pour les résidents du Canton.

            « Présentement, la réglementation provinciale, les lois municipales et le plan de zonage du Canton limitent le nombre de terrains au Canton où l’on peut installer une mini-maison. Nous avons fait du progrès avec la réglementation municipale sur les unités de logements supplémentaires, mais avec tous les terrains disponibles dans le Canton, je suis certain que plein d’options existent » partage M. Brunelle.