«Tant à dire! Tant à écrire!»  André Maurice 

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Joëlle Roy

            André est le fils d’Arsène et de Zélia Moreau. Il a grandi sur la 16e concession juste en haut de la côte. Petit gars, il n’avait qu’à descendre la butte pour aller se baigner. Son souvenir décrit une plage presque vierge où les multiples petits et gros chalets, construits un par-dessus l’autre, sont encore à venir.

            André est l’aîné d’une famille de cinq dont les quatre autres sont des filles. Papa Arsène est bûcheron. Le grand-père Albert avait construit son moulin à scie entre la 14e et la 15e concessions. La crique qui aboutit dans ce secteur, facilitait cette opération de coupe de bois. Le grand-père a construit plusieurs granges dans le coin avec l’aide de ses frères. Pas étonnant qu’il y avait de l’ouvrage pour les fils et petits-fils. 

            À la maison familiale, André se rappelle leur verger. Il n’est pas étonnant d’y voir la longue liste de légumes dans le jardin mais la liste de fruits est plus rare : cerises, poires, pommes et prunes. 

            L’école n’est pas parmi les meilleurs souvenirs d’André. La bonne sœur enseignante n’évoque rien de bon pour l’élève qui en a eu assez après la sixième année. «Elle était méchante!». Quel soulagement de sortir de là! 

En plus, la première tâche qui l’attend est spectaculaire. Avec Pépère Albert, il ira chercher la croix de chemin que l’on voit entre Lafontaine et la route de comté numéro 6. Cette dernière arrive du Québec par chemin de fer. 

            Un souvenir traumatisant refait surface. C’était à l’époque où on coupait les arbres sur le sentier qui deviendra Silver Birch, près de la baie du Tonnerre. Les billots sont transportés sur l’eau jusqu’au moulin entre la 14 et la 15. Il y avait tellement de bois que parfois le lot de bois tiré par un bateau remorqueur avance très lentement. 

            Une fois, pendant ce long voyage, une tempête s’élève. Grand-père Albert et oncle Gérard en avaient vu d’autres, pourtant. Albert finit par couper le cable et laisser aller les billots car il craignait pour leurs vies. Heureusement, les billots bien domptés, aboutissent sur la grève et attendent le beau temps

            Quelques années plus tard, il s’installera avec sa famille dans la maison juste en face de la croix de chemin qu’il avait aidé à transporter. Il a travaillé au moulin du grand-père pendant quelques années. Au début des années 50, la rencontre avec Fleurette Robillard sera déterminante pour l’avenir du jeune homme. En 1952, le Père Marchildon les unit pour toujours. 

            Après le moulin, André travaille pour Lincoln Electric. Quand l’opportunité se présente d’aller faire une formation à Toronto pour apprendre à souder, notre homme saute là-dessus comme sur la manne. Ce cours de quelques semaines sera déterminant pour le reste de sa carrière. 

            À Midland, il prendra un poste dans une «Machine Shop» qui réparait les bateaux sur la glace pendant l’hiver. Le hic c’est qu’André craint les dangers de la glace sur les cours d’eau. Parfois, ils allaient réparer des bateaux en se déplaçant sur la glace qui craque. Une de ces fois, les deux roues avant du camion ont renfoncé dans l’eau. André, qui avait gardé sa porte ouverte, est revenu au bord à la course. En plus, il faisait froid debout sur la glace au grand vent! 

            Deux ans après le mariage, on aménage en face de la croix de chemin sur la 16e. Les quatre enfants y sont nés : Roméo, Madeleine, Viviane et Priscilla. 

            Avec sa formation en soudage, André spécialise de plus en plus son métier. Il passera dix ans, de 56 à 66, à la fonderie de Midland. On y construit de grosses pièces telles que des criques hydrauliques ou encore des leviers pour les garages. 

            Quand la fonderie fermera, André refuse le transfert à Toronto qu’on lui propose. Rendu à ce temps-là, ces services étaient de plus en plus en demande. Quand il revenait du travail, souvent on l’attendait pour lui offrir des contrats. C’est comme ça que petit à petit, il développe son propre commerce. Il travaille dans son garage mais en un rien de temps, en 71, il faudra construire un gros atelier. 

            Fleurette a joué un rôle important dans le cheminement de cette entreprise. C’est elle qui s’occupait de toute la paperasse, la comptabilité et toutes les procédures qui incombent aux gens d’affaire. D’ailleurs, elle a aidé du début de l’entreprise car l’ouvrage ne lui faisait pas peur. «Elle en a peinturé des beams». Des poutres aux fers d’angle, elle assiste son homme dont l’entreprise déborde d’ouvrage pendant environ vingt-cinq ans. 

            On lui confiait des tâches particulières pour lesquelles il faut un savoir-faire. Comme par exemple, on lui demande de couper un camion en deux pour le rallonger de quatre pieds. Avec l’ajout d’un essieu supplémentaire, Georgian Bay Sanitation avait un nouveau bolide. 

            Même astuce pour un camion qui servait à déplacer les arbres de Noël pour le clan Robitaille. En plus de l’allonger, on l’organise pour que le fameux camion tire, en plus, une roulotte. André était nerveux de voir cette caravane partir pour Toronto. Il s’inquiète pour rien car tout roule rondement.

            Quand on ferme l’atelier en 94, on se lance dans une retraite vagabonde. On se gâte avec un beau Wannabego et salut Lafontaine! Dans cette maison mobile sur roue, on parcourt tout le pays. Deux fois vers l’est jusqu’à Terre-Neuve et l’ouest, on monte jusqu’au Yukon puis en Alaska pour revenir en Colombie britannique en bateau.

            Fleurette faisait partie des Dames de Ste-Anne de Lafontaine et des Filles d’Isabelle de Penetanguishene. Le couple a offert un bénévolat généreux au vieux manoir à Penetanguishene; on transporte les résidents, on aide pour les soirées de pub et toutes autres activités sociales. 

            Le plus beau des passe-temps c’est de regarder grandir la progéniture. Fleurette et André sont grands-parents de neuf enfants et arrière-grands-parents de treize petits mousses.

            C’est en 2009 qu’André et Fleurette aménageaient au Villageois. La santé de Fleurette détériorait et les marches de la maison devenaient impossibles. La confrérie de la nouvelle maison de retraite apporte des beaux échanges et voisinage. Le couple s’y plaît et y passera de belles années.

            Madame Fleurette nous a quitté en septembre 2020, en pleine pandémie. André se dit heureux et chanceux d’être en vie même s’il trouve que ses chums deviennent clairsemés. Il a rendu hommage plusieurs fois à ses quatre enfants qui s’en occupent si bien. Cher André, les fruits ne tombent jamais loin de l’arbre! 

Lors de leur 65e anniversaire de mariage en 2017, on aperçoit les jubilaires André et Fleurette (Robillard) Maurice en compagnie de leurs enfants Viviane, Priscilla, Roméo et Madeleine.